dimanche 14 septembre 2008

Red Thunder

par Julie G

Des hommes courent et se perdent
D’autres s’évadent et ne s’élèvent pas
D’autres dansent toutes une vie sur la corde raide
Et ils ignorent le bonheur qu’ils trouveraient en tombant
(Max Jacob, Sept peintres)




On commence généralement ainsi, je sais, mais je ne vais pas vous dire mon nom. Ca serait trop simple, ça gâcherait le plaisir.

Que puis-je vous dire alors ?

Je pense que je suis le type parfait de la personne heureuse. Non seulement je suis heureuse, mais, je sais que je le suis ; je le pense et je le dis. En outre, je suis entourée de gens heureux, je tache de l’être en toutes circonstances. Je suis belle, saine, intelligente, je côtoie des gens beaux, sains, intelligents. Riche ? Pour ainsi dire.

Seattle est ma ville, j’y suis née il y a seize ans, j’y ai vécu toute ma vie, j’y vis. Mon père dirige les services de police de la ville, les autres enquêtent, poursuivent, arrêtent, jugent, condamnent, préviennent, informent. Lui sourit, serre des mains, se cultive : il veille à son image. Comme moi, ma mère participe à cette image : femme au foyer parfaite, elle veille sur sa superbe maison et sur son adorable fille unique, tout en prenant le temps d’être une artiste. Elle peint. Quoi ? Des baisers ! Encore et toujours, des jeunes gens beaux, souriants, la dent blanche, le cheveu brillant, s’embrassant, se léchant, se mordillant, les yeux clos, les mains dans les cheveux de l’autre. Ma meilleure amie ? Susan, déléguée des élèves, première au tableau d’honneur, jeune espoir littéraire de la ville, ange blond et élancé aux yeux bleus, descendu du ciel pour nous pacifier. Un petit ami ? Cela va de soi ! Brad est capitaine de l’équipe de basket du lycée, compose des morceaux pour le nouveau groupe de rock à la mode, physiquement la totale : biceps, pectos et tablettes, brun ténébreux à la bouche sensuelle. Il va sans dire que son meilleur ami, Josh, est capitaine de l’équipe de foot, il va sans dire qu’il est sublime, il va sans dire qu’il est follement amoureux de Susan, il va sans dire que le lycée entier est jaloux des « quatre fantastiques », il va sans dire que tout le monde nous adore malgré tout, nous sommes si merveilleux.

Quant à moi. Je suis, je m’en excuse, plus petite que Susan mais mes courbes parfaites rattrapent ce petit inconvénient. Je ne suis pas blonde, certes. Certains diront que je suis brune, ne me réduisez pas à cela ! L’important est dans le reflet ! Un reflet roux, un reflet flamboyant. Le genre de reflet qui fait toute la différence. Ce reflet, combiné à mes grands yeux verts, ne me rend rien moins qu’irrésistible. Je ne suis pas première de classe… mais deuxième, je ne suis pas déléguée mais capitaine des cheerleaders. Je suis également une danseuse douée, que chacun voit déjà intégrer, dès la fin de cette année, un des plus grands ballets contemporains de l’état. Je suis aimée des miens, adorée par tous ; j’aime en retour passionnément. Quelle chose étrange peut bien venir gâcher toute cette perfection ?

L’ennui. L’ennui s’insinue dans ces mondes idéaux, peints en couleurs pastel, doux comme le miel et lisses comme la soie. L’ennui m’a poussé à faire deux bêtises, deux accros dans cette trame parfaite. La première bêtise va me pousser à mentir pour la première fois à mes parents, autrement que par omission. La seconde bêtise va faire que je vais mourir dans exactement trente sept jours.

J-37 : Aujourd’hui, cela fait vingt et un jours que j’ai commis la bêtise N°1 et le stick a viré au rose. A force d’ennui, de beauté et d’irrésistibilité…

J-36 : Je le dis à Susan.

J-35 : Je le dis à Brad.

J-34 : Susan le dit à Josh, qui « connaît » une clinique.

J-33 : Je prends un rendez-vous.

J-32 : Je mens à Maman.

J-31 : Maman parfaite voit tout et sait tout, mais mens à papa.

J-30 : Jour du rendez-vous, problème réglé.

J-29 : Je pleure.

J-28 : Brad me console, je suis la femme de sa vie. Nous en aurons plein d’autres en temps voulu.

J-27 : Je ris à nouveaux. Retrouve mes amis, suis heureuse, m’éclate, tout est oublié.

J-26 : Retour de l’ennui.

J-25 : Je suis différente. Je comprends mieux le monde. Je ne retiens que l’adrénaline causée par la bêtise N° 1. Je suis accro, je veux la retrouver. Impunité. Lâcheté maternelle. Facilité.

J-24 : Je réfléchis à un autre moyen de faire revenir l’adrénaline.

J-23 : N’étant pas très imaginative, je demande à mes amis de m’aider. Ensemble nous trouverons bien une bêtise digne de nous.

J-22 : Les deux créatifs de la bande, Susan et Brad, nous ont concocté un scénario excitant. Nous allons mener l’enquête. Découvrir qui est le serial killer qui œuvre depuis plusieurs semaines à Seattle et le confondre.

J-21 : Mon rôle consiste à infiltrer l’ordinateur de mon père et à récupérer toutes les informations sur l’enquête. Je le fais dès aujourd’hui. Un jeu d’enfant. La bêtise N°2 est en branle.

J-20 : Nous recoupons les informations, nous concentrons surtout sur les localisations des agressions, nous tâchons de deviner quels pourraient être les prochains lieux, les visitons un par un.

J-19 : Brad et moi allons ce soir au cinéma d’un quartier que nous ne fréquentons habituellement pas, où a été enlevée une victime il y a deux semaines. Susan et Josh, font de même à un autre endroit de la ville, dans une station service. Susan se rend aux toilettes et se fait braquer, on lui vole son portefeuille.

J-18 : Susan est traumatisée, en larmes. Nous nous disputons car elle veut arrêter, je la traite de « lâche ». Josh prend son parti, ils nous abandonnent.

J-17: Brad et moi visitons deux autres endroits aujourd’hui. Dans un motel, il tente d’avoir à nouveau des relations sexuelles avec moi. Je refuse, il s’énerve. Il ne voit plus l’intérêt de notre histoire sans cela. Il trouve que j’ai changé, que je deviens « folle », que je m’accroche trop à cette enquête « aussi dangereuse que débile ». Il renonce au plan qui est issu de son propre esprit.

J-16 : Je me retrouve sans amis ni amour, en trouver d’autres ne me tente pas, je sais que l’ennui reviendrait tôt au tard.

J-15 : Je décide de reprendre l’enquête seule. Je consulte à nouveau les fichiers de mon père. Modifie mes lieux de prospection en fonction des nouveaux développements.

J-14 : Je me retrouve ce soir dans un lieu si « glauque » qu’un « slasher » n’en voudrait pas. Mais là je retrouve l’adrénaline. M’en sustente. En veux plus.

J-13 : Sortie obligatoire en famille aujourd’hui. Je ne peux m’y soustraire. Engoncée dans une robe parfaite un sourire feint aux lèvres je m’enfonce dans l’ennui, il m’avale, je dépéris. Mes trois anciens amis sont là, ils me regardent, inquiétude de circonstance sur le visage.

J-12 : Susan a « fait part de son inquiétude » à sa mère, qui a prévenu la mienne qui en a informé le « chef de la police ». Je suis consignée. Enfermée dans ma chambre, mais je sais comment ne pas l’être dans l’ennui. Je prépare un plan, retourne chaque info, chaque indice, chaque réflexion dans ma tête. Je visualise tout, prépare tout. Je m’y vois. C’est comme si j’y étais.

J-11 : Imaginer ne suffit plus, j’entends l’ennui ramper vers moi. Je sais que si il parvient encore une fois jusqu’à moi, j’en perdrai réellement la raison.

J-10 : Très tôt le matin, j’essaye de « faire le mur », peine perdue, une voiture de patrouille est stationnée à l’arrière de la maison. Je passe la journée à monter un autre plan. La nuit tombée, je descends à la cuisine, puis à la cave, je sors par la lucarne à l’avant de la maison. Je suis libre. J’erre. Je suis à la recherche des ruelles les plus sombres. J’en repère une pleine de promesses. Je m’y engage. J’entends deux personnes parler. Malgré l’heure, elles ne chuchotent pas. Elles ne se disputent pas non plus, cela ressemble plus à un badinage amoureux. Je sais quelque chose de la beauté, mais ces deux là sont plus que parfaits, ces deux là sont animaux, félins et chatoyants. Lui est blond, jeune, pâle, ses yeux rouges sont des aimants. Elle est rousse, je n’avais jamais croisé une rousse aux cheveux plus vifs, parfaits, agressifs que les miens. Bien qu’elle ait l’air d’une sauvageonne, je sais que je ne gagnerais pas un concours de beauté face à elle.
- « Riley », dit-elle, « regarde n’est-ce pas justement cette jeune fille que nous attendions ».
- « Si tu le dis », répondit-il.
Ils se jetèrent alors sur moi, en un instant, mes cheveux étaient relevés, ma tête inclinée et on se penchait sur mon coup comme pour l’embrasser. La douleur fut fulgurante, j’eus seulement encore suffisamment de raison pour entendre : « Une dernière fois, pour toi, Victoria ».

J-9 : Je suis consumée par la douleur.

J-8 : Douleur encore, je comprends grâce à ce que j’entends autour de moi ce qui m’arrive.

J-7 : Douleur toujours, mais je n’ai pas peur, je suis de nouveau heureuse, je sais que l’ennui ne pourra plus jamais m’atteindre.

J-6 : J’apprends à me battre.

J-5 : J’apprends à haïr.

J-4 : J’apprends à haïr quelqu’un que je ne connais pas.

J-3 : J’ai de nouveaux amis, je vais me battre auprès d’eux.

J-2 : Je n’ai plus peur de l’ennui.

J-1 : J’ai oublié l’existence même de l’ennui. Demain, nous allons près d’une petite ville appelée Forks.

Jour J : Jour de joie nous allons nous battre, accomplir une mission et ainsi remercier notre créateur.

Je m’appelle Bree.

Orthographe : 3 et 3
Respect des consignes : 1 et 1
Respect de l'oeuvre et du theme : 4 et 5
Originalité : 4 et 6
Emotion : 2 et 3
Moyenne : 13.5 et 18
Total : 15.75

Commentaire Keedie : Les - : L’histoire est trop centré sur Bree. La construction de l’armée des nouveau-nés n’est pas assez développée.
Les + : La citation du début qui fait beaucoup Stephenie. Le respect de l’œuvre. J’aime beaucoup le style que tu as utilisé pour composé ta fiction.

Commentaire Cinderella : Superbe histoire, bien écrite et très originale… rien à ajouter

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